samedi 20 janvier 2018

Jury du procès du Lac-Mégantic : des leçons qu'on ne retiendra pas


Le procès pour négligence criminelle concernant les 3 employés de la Montreal, Maine and Atlantic Railway (MMAqui se tenait dans le cadre de la tragédie du Lac-Mégantic, laquelle a fait 47 victimes le 6 juillet 2013, est terminé. Ce que l'on comprend, c'est que les membres du jury – huit hommes et quatre femmes – qui ont commencé à délibérer le 10 janvier 2018, ont pris 9 jours de délibération. Ce qui est assez long, du moins selon l'avis des experts cités dans les médias. D'autant plus que la « catastrophe » a été évitée de peu, les jurés se disant à un moment donné être dans l'impasse, suggérant par le fait même, probablement par écoeurement et lassitude, que le procès pourrait avorter.

Je ne sais pas si ces experts ont raison; c'est quand même des experts. Je ne peux juger de la normalité de ces délais, je n'ai pas assisté au procès et comme la majorité des citoyens, j'ai une connaissance exclusivement médiatique de ce dossier.

Ce que je sais par exemple, c'est que la vie en groupe et en équipe, surtout dans un milieu clos sans possibilité de fuite par en avant, en ayant une obligation de résultat à très court terme est très exigeante.

Quelques recherches effectuées ne donnent pas d'indication à savoir comment les jurés sont introduits et préparés pour réaliser leur rôle. Autrement dit, sont-ils formés au rôle d'un juré avant de commencer à délibérer ou sont-ils garrochés dans une salle avec du papier et des crayons, laissés à eux-mêmes? Passons sur les aspects juridiques du rôle de juré, en considérant que l'on ne fait pas d'avocat en 2 heures. Attardons-nous par contre sur deux aspects importants que les concernés peuvent facilement maîtriser à court terme, en prenant simplement appui dans leur expérience personnelle : la vie en équipe et la recherche de consensus.

Je ne sais pas ce qui se passe dans les premiers moments des délibérations d'un jury, suite à la fin des directives du juge. Ce que je comprends de celles-ci, c'est que le juge s'en tient strictement aux aspects de droit et de preuve. C'est correct, mais ce n'est peut-être pas suffisant.

En ce sens, si j'étais juge, j'aborderais dans mes directives ce que l'on appelle les Lois de Tuckman concernant les étapes de formation et de gestion de la vie en équipe. Il y en a 4 ou 5 selon le comment vous voulez les rendre et les comprendre. Mais sur le fond des choses, elles sont immuables et par expériences multiples, elles fonctionnent dans 100 % des cas.

Il y a (de l'anglais), l'étape FORM c.-à-d. la formation de l'équipe où tout le monde il est beau et intéressant. Il y ensuite, l'étape STORM (tempête) c.-à-d. l'étape de tension ou l'on s'accroche sur les valeurs et les objectifs de l'équipe ainsi que sur la démarche. Dans le cas d'un jury, on ne peut naturellement quitter l'équipe si cela ne fait pas notre affaire. 3e étape – NORM – celle de la normalisation : on s'entend et tout le monde se trouve un rôle à sa mesure. 4e étape – PERFORM – l'équipe obtient des résultats jusqu'à l'atteinte de l'objectif final.

C'est 4 étapes peuvent paraître trivial, mais en connaître les fondements et la dynamique est fondamental dans la gestion d'une équipe, surtout pour gérer les crises occasionnées par le stress, comme lors d'une activité de jury, concentrée dans un laps de temps assez restreint.

Le second sujet que j'aurais abordé avec le jury, c'est la notion de consensus. Un consensus, ce n'est pas de niveler par le bas. C'est obtenir une solution gagnant-gagnant qui même si elle n'est pas parfaite, permet de satisfaire tout le monde. Autrement dit, c'est la science des compromis où les adeptes de l'absolu, les abuseurs du principe de Précaution et du « J'ai raison » sont souvent mal à l'aise.

Ceci étant, dans le cas qui nous occupe, celui des 3 accusés de la MMA, l'acquittement était le seul verdict possible. Dans le contexte de cette tragédie aux responsabilités multiples et infinies, il n'était pas de la responsabilité du jury de les blâmer pour avoir bâclé honnêtement leur travail; la vie qui leur reste s'en chargera.

Les coupables c'est nous tous indirectement qui demandons du rendement pour nos placements. Hey oui, il faut savoir qu'un jour en 2003, par le biais de la Caisse de dépôt et de placements du Québec, nous avons été propriétaires d'une partie de la MMA à hauteur de 14,7 M$. Ce qui fait que des compagnies comme la MMA pour satisfaire les besoins de rendement de son propriétaire à pris les mesures requises de coupure de coûts appropriés. Ce qui fait que l'entretien a été peut-être négligé, ce qui fait que… que la MMA était une compagnie de m… ce qui fait que les 3 accusés innocentés hier ne peuvent porter seuls sur leur dos, l'ensemble de la tragédie.

Dans le monde complexe de 2018, on ne retiendra pas que les procès avec jury peuvent être des tâches très ingrates (et sous-payés) où les concernés sont souvent mal préparés avec une obligation de résultat. On ne retiendra pas pas aussi notre bien-être financier est souvent basé sur la souffrance de quelqu'un quelque part qui comme nous, ne demande qu'à vivre une vie simple et bonne.

Jocelyn Daneaujocelyndaneau@gmail.com
Blogueur sur le Huffington Post Québec : http://quebec.huffingtonpost.ca/author/jocelyn-daneau/

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